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Les Six Jours de Bercy
Écrit par Comite Technique Piste   
03-03-2010
    (Source : www.cyclismag.com par Dominique Turgis) Il y a 25 ans, le monde cycliste se mettait sur son 31 pour le retour des Six Jours de Paris dans le tout neuf Palais Omnisports de Paris Bercy. Mélange de nostalgie et d'espoirs de voir renaître un des temps forts de la vie sportive de la première moitié du 20e siècle. Cinq ans plus tard, l'échec était au bout de la piste. Retour en arrière.


 

 

Elle était blonde, bien roulée, elle venait du Cameroun et on l'a jetée aux orties avant même le temps des premières rides. La piste du Palais omnisports de Paris Bercy (P.O.P.B.) n'a jamais pu s'imposer. Victime de la comparaison nostalgique avec celle du Vel' d'Hiv' de la rue Nelaton et des modes qui passent.
Depuis sa démolition en 1959, le milieu cycliste pleure son vélodrome d'hiver. L'absence de piste couverte est invoquée à chaque contre-performance des pistards et même des routiers français. Quand Morelon et Trentin dominent les vélodromes du monde entier, on leur promet un Vel' d'Hiv'. Quand la piste couverte de Grenoble est ouverte en 1971, elle est saluée mais Grenoble, ce n'est pas Paris. Alors, pour faire parler de soi, on lance des projets de vélodromes couverts : Puteaux, Fontenay sous Bois, tous avortés.

DÉBUT DU MALENTENDU
Quand, en 1979, le projet de centre sportif à la place des entrepôts de vin de Bercy est lancé pour de bon, c'est tout de suite le « côté » Vel' d'Hiv' qui est mis en avant. Début du malentendu car le projet se veut omnisports dès le départ avec aussi la mise en scène de spectacles musicaux. Pourtant, l'organigramme donne le change. Jacques Goddet est président du directoire du Palais omnisports et Jean Bobet est nommé directeur sportif au début des travaux mais il sera remplacé par Andy Dickson, organisateur de boxe (l'autre sport vedette de la rue Nelaton).
« Bercy » (finalement, le p'tit nom du POPB) est inauguré avec les 6 Jours de Paris le 3 février 1984. Encore le symbole, encore le malentendu. Les caméras de télévision sont là, c'est un événement. Un mois avant, ce sont les premiers tours de piste d'Alain Bondue qui ont le droit au journal de 20 heures.

PROGRAMME À L'ANCIENNE
Pour ces premiers Six Jours, on appelle à la rescousse les anciennes gloires comme André Pousse. Titi parisien, ancien « écureuil » des Six Jours, il est devenu une figure du Tout-Paris. On lui demande de raconter ses souvenirs mais lui sait bien «qu'avant, les ouvriers se déplaçaient à vélo. Aujourd'hui tout le monde a une moto ou une auto. » Les temps ont changé mais pas le programme des Six Jours.
Ce programme veut ressembler à celui de l'époque Nélaton. La durée en moins, puisque les coureurs ne sont en piste que le soir et les après-midi de la fin de semaine. Il y a donc des chasses (les américaines), assez longues, des séries de sprints pour distribuer les points et des courses de primes pour répartir les sous. Mais Georges Berretrot n'est plus là pour les annoncer. La tradition de la Reine des Six Jours est respectée. Ce sera Julie, une animatrice d'Europe 1 qui a mis des billes dans l'affaire.
Dès les premiers tours de piste, lancés par Jacques Chirac le maire de Paris, les « anciens » trouvent le public froid, l'ambiance morne, « c'est plus comme avant. » Suite du malentendu. Ils accusent l'éclairage de mettre trop en lumière les spectateurs et d'éteindre leur gouaille. Pourtant, un orchestre tente d'animer la course et salue le dernier tour des sprints et des chasses par une trompette de la charge de la cavalerie et par « C'est une fleur de Paris ». Jean-Marie Leblanc, féru de jazz, proposera de remplacer l'accordéon par ...un jazz-band. Bernard Vallet, le vainqueur de ces premiers Six Jours trouve que la musique est plus efficace à l'étranger. « En Allemagne, parfois j'ai envie de danser sur mon vélo. » Des chanteurs, plus ou moins aimés, viennent aussi sur la scène au centre de la piste, car les Six Jours, c'est un spectacle, mais rien n'y fait.

PLUS L'HABITUDE DE VOIR DE LA PISTE
En 25 ans, les habitudes se sont perdues. Le grand public ne connaît pas la piste et ce n'est pas grâce à Bercy qu'il va pouvoir réviser ses classiques. Là où la piste de Grenelle proposait tout l'hiver des américaines, omnium, tournois de vitesse et, surtout, un lieu d'entraînement, le P.O.P.B. ne propose que les Six Jours. Pourtant, au début du projet, la municipalité voulait voir ce lieu ouvert au public même entre les compétitions et les spectacles, en faire un lieu d'entraînement. Mais le temps et les travaux nécessaires pour transformer Bercy entre deux manifestations, rangent ce vœu pieux au placard. Entre 1984 et 1999, la piste de Bercy n'accueillera que trois compétitions : les Six Jours, l'Open des Nations et un match France-Italie en 1985, pour renouer avec la tradition du Vel d'Hiv, là encore.
Le prix de la location de la piste va obliger les championnats du monde 1998 à se replier sur le vélodrome de Bordeaux. Fin du malentendu. Plus de cadeaux pour le vélo.

MANQUE DE VEDETTES
Le gros problème des Six Jours de Bercy est d'attirer des coureurs vedettes. En 1984, les vedettes font de la route, plus de la piste. Heureusement, juste avant les Six Jours, Francesco Moser pulvérise le record de l'heure de Merckx sur la piste de Mexico. Il est déjà prévu au programme de Bercy où il va présenter son vélo révolutionnaire. C'est lui la tête d'affiche. Une tentative contre le record sur piste couverte est même envisagée. Mais le champion italien est blessé à la selle. Les organisateurs se contenteront de sa présence pendant les Six Jours. D'autres très bons coureurs sont présents : Zoetemelk, Saronni, Roche, Bondue. Mais les autres, vedettes des vélodromes, ne peuvent attirer la foule. Si Julien Clerc remplira Bercy sur son prénom, Patrick Clerc, spécialiste français, n'est pas assez connu.
En février 1984, les grandes vedettes françaises sont absentes. Le genou de Bernard Hinault est convalescent et ses précédentes expériences sur les pistes d'hiver ne lui ont pas laissé de bons souvenirs. Le vainqueur du Tour 1983, Laurent Fignon, Parisien, est absent lui aussi.
Bernard Hinault ne viendra qu'une fois à Bercy sur son vélo. C'était à l'occasion d'un match France-Italie 1985, où il partage l'affiche avec Moser. Le public le sifflera pour un passage à vide pendant la course derrière derny. Quand ils le veulent les spectateurs retrouvent les accents de la rue Nélaton. Le Blaireau viendra fêter ses adieux en 1986 mais pas sur le vélo. Par contre, Laurent Fignon deviendra un habitué des Six Jours comme Charly Mottet, l'autre grand coureur français des années 80.
Pour jouer la carte « routier », les organisateurs vont même organiser un omnium de vedettes du Tour de France avec Kelly, Zimmermann, Mottet, Criquielion, Da Silva ou Zoetemelk en 1986.

ÉQUIPES NATIONALES
Pour rester dans l'ambiance années 50, les organisateurs de Bercy tiennent aux équipes nationales. Mais, comme les vélodromes étrangers, ils vont apparier les meilleurs Français (Vallet, Clerc, Bondue) avec des « taxis » d'autres pays. Ces taxis sont des spécialistes reconnus qui ne sont pas là pour voler la vedette aux routiers mais les mettre dans de bon rails. La paire Vallet-Frank va mettre le feu aux tribunes quand elle s'opposera au tandem Moser-Thurau. Si la course reste un spectacle, leur lutte pour prendre un tour ou se dédoubler est intense.
Pendant toute la durée des Six Jours, les organisateurs vont s'attacher à présenter des équipes nationales ou avec des coureurs du même groupe sportif. Mais les vedettes françaises auront très souvent droit à leur taxi. Charly Mottet gagne la dernière édition associé à Etienne De Wilde devant la paire Fignon-Freuler.

LES RECORDS METTENT DE L'AMBIANCE
Après la première édition, les organisateurs comprennent que les séries de sprints et les courses de primes ne suffisent pas pour enflammer les gradins. Dès la deuxième édition, ils misent sur les épreuves d'encadrement comme les tentatives de record, les courses de demi-fond. Jeannie Longo, Philippe Boyer ou Michel Vaarten vont venir tenter leur chance. Et, côté public, ça marche. Sur 500 m ou trois kilomètres, c'est plus facile de maintenir une ambiance explosive.
En 1986, pour dynamiser les soirées, les organisateurs ajoutent d'autres disciplines de la piste au programme. Adieu les séries de sprints. Bonjour les éliminations, les courses aux points, les scratch, les courses derrière burdin. Autre changement, la musique électronique remplace l'accordéon et les chanteurs qui en ont marre de se faire siffler. Les courses de patins à roulettes viennent animer les coupures. Nouvelle formule ou pas, les coureurs gardent leurs habitudes et l'édition 1986 est marquée par une descente de police qui met à jour un trafic de produits dopants.
L'interruption d'un an en 1987 coupe l'élan. Malgré les changements de formule et les équipes nationales, les coureurs de Six Jours tombent parfois dans les petits arrangements qui nuisent au sport et qui déplaisent aux organisateurs. L'intérêt médiatique diminue. Les Six Jours sont abandonnés. Le malentendu se termine sur un échec. Comme s'était terminée l'histoire du Vel d'Hiv' de Grenelle, jugé non rentable.

 
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